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Les médias peuvent-ils tout dire ?

Comment les magazines people publient-ils un scoop ? En France, le droit à la vie privée est protégé par l’article 9 du Code civil de 1990 qui affirme : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent sans préjudice de la réparation du dommage subi prescrire toutes mesures telles que séquestres, saisies et autres, propres à empêcher ou à faire cesser une atteinte à la vie privée ; ces mesures peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé. » Une loi restrictive qui induit fréquemment la condamnation des magazines people pour leurs publications. Cette disposition s'accompagne de clauses répressives : le Code pénal sanctionne sévèrement les écoutes ainsi que l'enregistrement des paroles et des images.

 

communication contrôlée, photos volées

Les politiques sont des personnages publics. Depuis les années 1960, on assiste à un véritable phénomène de peopolisation et d’étalage de leur vie personnelle. Ils n’hésitent plus à s’afficher avec leur compagnon ou même à inviter les caméras dans leur sphère intime. Pourtant, le nombre de procès pour atteinte à la vie privée n’a cessé de croître. Dès lors que la peopolisation se fait à l’insu des politiques, les procès fleurissent. 16 000 euros pour Ségolène Royal en mars 2009 contre Paris Match pour les photos au bras de son compagnon en Espagne. 20 000 euros pour Florian Philippot en décembre dernier contre Closer pour des clichés dévoilant son homosexualité. Ce sont les montants des dommages et intérêts versés par des magazines people aux politiques. Des chiffres qui peuvent aiguiser les appétits et devenir un vrai business. Si jusqu'ici en France, la transparence ne semblait pas apparaître comme une vertu d’intérêt public aujourd’hui lorsqu’une affaire éclate, la question est la même : la publication de ces informations sert-elle le débat d’intérêt général ? 

 

l'affaire hollande-gayet : une révélation d'intérêt général ?

Le 6 mars 2014 s’ouvrait le procès de Julie Gayet contre Closer. Le magazine avait publié le 10 janvier des photos volées du chef de l'État puis de la comédienne devant un immeuble situé rue du Cirque. Julie Gayet demandait réparation pour « violation de sa vie privée » et 50 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 4 000 euros pour les coûts de procédure. Mais aussi une publication judiciaire sur la moitié de la couverture de Closer. Lors de ce procès, le magazine avait invoqué le droit à l'information et s’était justifié que la révélation s’inscrivait dans un « débat d’intérêt général ». Depuis plusieurs mois, cette relation « se racont[ait] dans les dîners en ville (...), on en ri[ait] sur des plateaux télé », avait relevé Laurence Pieau, directrice de la publication de 

de l'hebdomadaire. Pour le journal, la sécurité du président était en jeu, puisque sa garde rapprochée n’était pas présente lors des faits. L’avocat de la comédienne Me Jean Enocchi s’était quant à lui interrogé : « Quel est l'intérêt général pour la société de révéler le nom de Julie Gayet et sa photo ? » Aucun apparemment, puisque le magazine a été condamné à verser 15 000 euros de dommages et intérêts à l’actrice.  

 

droit français vs droit anglo-saxon

La France a tenté de trouver le point d’équilibre entre droit à l’information et droit à la vie privée par la voie législative. Depuis plus de trente ans, la tendance est à la multiplication de dispositifs législatifs réduisant la liberté de la presse. La déontologie journalistique n’évolue pas sur la protection de l’intimité. Pourtant, les supports médiatiques et l’émergence d’Internet ont marqué une véritable révolution. 

La tradition anglo-saxonne privilégie la responsabilité déontologique de chaque journaliste. Les lois régulant le droit à la vie privée sont limitées. Aux Etats-Unis, le premier amendement interdit tout obstacle à l’indépendance de la presse. Au Royaume-Uni, la gutter press peut se permettre beaucoup de libertés, même si aucune loi qui régule les médias n’est constitutionnellement écrite. Révéler la vérité ou faire la lumière sur des histoires cachées, telles sont les missions dont s’est investie la presse people. Mais la liberté de la presse se heurte au respect de la vie privée. Si la presse people demeure, c’est parce que ses révélations fondent l’intérêt public.

 

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©2015 par Florian Guadalupe, Victoria Laurent, Joanna Thevenot et Alev YIldiz

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